Maxmur : au beau milieu du désert, faisant face à Daesh et à tant d’autres ennemis, armes à la main, 12 000 hommes, femmes et enfants venus de villages et de régions différentes ont développé un système d’auto-organisation partant du bas.
De par le monde douze millions de personnes vivent aujourd’hui dans des camps de réfugiés, et des millions d’autres dans des campements de fortune. Conflits économiques entre les États, guerres ethniques ou religieuses, catastrophes écologiques… les causes des déplacements de populations sont chaque jour plus nombreuses. Les camps se multiplient et s’installent partout sur la planète, et alors qu’ils étaient à l’origine considérés comme temporaires, comme des « exceptions », ils sont devenus des lieux de vie dans la durée. La majorité d’entre-eux sont organisés de manière très verticale par les États et les organismes internationaux. Leur administration est totalement dissociée des habitants. On empêche même les mouvements d’auto-organisation en divisant les communautés, pour éviter de perdre le contrôle des populations.
À Maxmur, dans l’ouest du Kurdistan irakien, l’histoire est différente. Dans ce camp, à 70 km de Mossoul, des kurdes chassés de Turquie pour leurs engagements politiques, ont refusé de se laisser administrer, et ont mis en place leur propre organisation selon le paradigme du « confédéralisme démocratique », basé sur des assemblées populaires, où le pouvoir décisionnel des femmes et des jeunes est particulièrement important..
L’histoire de Maxmur est intimement liée à celle du Rojava, cette région autonome au nord de la Syrie, où l’expérience du confédéralisme démocratique a été mise en place, cette fois à l’échelle de centaines de milliers de personnes.
À l’heure actuelle, le gouvernement turc, s’appuyant sur des milices djihadistes, se fait fort de massacrer cette expérience politique au Rojava, alors qu’elle devrait au contraire faire partie des sources d’inspirations sur lesquelles s’appuyer, dans cette époque où le savoir-vivre ensemble est le seul rempart qui peut encore nous éviter la guerre de tous contre tous.
Plus que jamais, il est important de tourner les yeux vers ces laboratoires politiques, de leur apporter notre soutien, de les comprendre et de s’en inspirer.
Léa Nazer et Emile Brun / 32min / 2018