Depuis ce mercredi 21 juillet, le Ciné Voyageur semble soumis aux nouvelles règles de protocole sanitaire. On dit « semble » parce que c’est toute une mission de trouver l’info quand on n’est pas soutenu par des fédérations de restaurateurs ou des syndicats de patrons. Un décret d’application qui apparaît 24h avant sur Legifrance, des « débats » encore en cours au parlement, c’est pas le plus simple pour s’organiser. On pensait que le « tout plein air » nous protégerait, ça n’a pas été le cas.
Aucune décision collective n’a été prise pour le Ciné Voyageur, vu qu’on est pris de court et qu’une partie de l’équipe est déjà bien occupée sur la tournée, mais on devrait refuser d’utiliser le pass sanitaire et maintenir nos projections sous la jauge de cinquante personnes pour l’esquiver. On préfère compter que se mettre à contrôler. Contrôler un pass sanitaire, en plus de flirter avec le secret médical, c’est contrôler une identité. Il est hors de question pour nous de faire ce geste d’habitude réservé à la police (qui n’a pas tant le droit d’en abuser elle-même d’ailleurs). On arrive bien tard après des années de Vigipirate, de mesures sécuritaires d’exception devenues des normes, mais on a pas envie que nos événements servent à banaliser ce genre de gestes, on veut les garder ouverts à toutes et tous. Le contrôle d’identité généralisé et permanent est une nouvelle violence imposée, entre autres, à certaines personnes trans dont l’identité ne correspond pas à la carte, à l’état civil, ou aux personnes sans-papiers dont on se demande bien comment elles et ils vont arriver à naviguer à travers ce nouveau dispositif de contrôle…
En tant que personnes qui organisent des événements sans y jouer notre survie économique collective ou personnelle, on a le sentiment d’être des pions dans le jeu de la carotte et du bâton que vient de lancer le gouvernement. Faîtes-vous vacciner, vous serez récompensés. Traînez les pieds et vous irez au coin. La décision, apparue de nulle part, de lever l’obligation du port du masque dans tous les espaces soumis au pass sanitaire, même clos, révèle à quel point cette logique de récompense/punition a remplacé toute stratégie de santé publique. A quel moment ça paraît pertinent, tout en vociférant sur l’ampleur de la 4ème vague, de rassembler dans un espace clos, sans distanciation sociale, des potentiels porteurs sains (les personnes vaccinées) et des personnes pas malades mais pas immunisées (les personnes avec test PCR) ? Bref, l’intention n’est pas de rejoindre la liste des 56 millions d’épidémiologistes des internets, mais simplement d’exprimer notre sensation d’être devenus des bouts de carotte agités dans tous les sens par le gouvernement devant un âne qu’on emmène droit dans le mur. Et c’était pas notre projet…
(ce texte a été écrit avant que Jean Castex ne démente le contrôle de la carte d’identité en même temps que du pass sanitaire – enfin démente, plutôt change d’avis devant l’impossibilité d’appliquer ce qui était prévu – ce qui ne change au final pas grand-chose sur la notion de contrôle liée à ce pass)